Interview avec Célia, Chanteuse du groupe ODC

Interview avec Célia, Chanteuse du groupe ODC

8 novembre 2025 0 Par Chacha

Avec Twisted Love, ODC franchit une nouvelle étape dans son parcours artistique. Le groupe parisien, mené par la voix intense et habitée de Célia, affirme plus que jamais son identité : un metal moderne, hybride, libre de tout cadre et profondément émotionnel. Entre puissance brute, mélodies sensuelles et influences multiples, cet album marque une forme de renaissance : celle de l’acceptation de ses paradoxes, de ses fragilités, mais aussi de sa force. Dans cet entretien, Célia revient sur la genèse de Twisted Love, sa conception, ses inspirations, et la manière dont il résonne autant individuellement que collectivement.

 

Vous venez de sortir « Twisted Love » via le label BLKIIBLK. Qu’est-ce qui a été le déclencheur de cet album ?
On a senti que c’était le moment. Après plusieurs singles et expérimentations, on savait enfin ce qu’on voulait dire et comment le dire. Twisted Love est né de ce besoin d’alignement.
On avait accumulé beaucoup d’émotions et d’expériences — on voulait les transformer en quelque chose de cohérent, fort et sincère. C’est l’album qui marque notre affirmation : celle d’un Metal moderne, libre, hybride et profondément personnel.

Le morceau-titre « Twisted Love » est décrit comme traitant des contradictions – attraction & destruction, douceur & brutalité. Comment ces thèmes se sont-ils traduits musicalement et visuellement ?
Musicalement, Twisted Love incarne la collision entre puissance et fragilité. Les riffs sont lourds, presque rageurs, mais portés par une mélodie vocale très émotionnelle. On voulait cette tension constante : l’équilibre entre chaos et beauté.
Visuellement, on a travaillé cette dualité avec une imagerie inspirée de la haute couture — toujours ce contraste entre une musique Metal et un univers élégant, entre le dark et le luxe.

Votre style est « hybride », mêlant metal alternatif, rock moderne et textures électroniques. Comment avez-vous équilibré ces différentes influences lors de l’écriture ?
Chez ODC, rien n’est prémédité. On part toujours d’une émotion. Si un passage appelle un breakdown metalcore, on le suit. Si une mélodie pop permet d’ouvrir l’espace, on l’assume. Et si une ligne de basse appelle un flow plus rap, on la laisse vivre.
On ne réfléchit pas en termes de genres, mais de sensations. Chaque chanson suit sa propre logique émotionnelle. C’est ce qui fait l’ADN d’ODC : la liberté totale de mêler puissance, mélodie et attitude sans jamais choisir entre elles.

L’album a été produit à Nashville par Kellen McGregor (de Memphis May Fire). Qu’est-ce que ce choix a apporté au son ou à la dynamique du groupe ?
Kellen a apporté une dimension plus cinématique et puissante. Il a ce sens du son massif et moderne typiquement américain, mais avec une attention incroyable portée aux émotions.
Il sait parfaitement mettre en valeur une voix féminine dans un univers metal, en gardant la fragilité au cœur de la force. Grâce à lui, Twisted Love a cette densité et cette clarté qu’on recherchait — une sorte de dialogue entre brutalité et humanité.

Il y a une reprise surprenante sur le tracklist : « Despechá » (de Rosalía). Qu’est-ce qui vous a poussés à reprendre ce titre et comment l’avez-vous « métalisé » ?
Despechá s’est imposée d’elle-même. C’est une chanson sur la libération, sur le fait de transformer la déception en puissance. C’est exactement ce que raconte Twisted Love.
J’ai vécu plusieurs années en Amérique latine et j’adore chanter en espagnol. C’était l’occasion d’oser un pont entre deux mondes : la sensualité et la lumière du morceau original, confrontées à l’obscurité et à la puissance du metal. On l’a rendue plus dramatique, plus viscérale, mais toujours avec cette énergie de renaissance.

Le single « My Name Is Gold » traite de la cupidité et de l’obsession de la célébrité. Est-ce un thème qui traverse tout l’album ou un morceau isolé ?
Twisted Love parle des relations humaines sous toutes leurs formes — avec les autres, avec soi, avec la société. My Name Is Gold met le doigt sur notre rapport à l’image, à la reconnaissance, à l’ego.
C’est une satire, mais aussi une réflexion personnelle. Dans ce monde où tout doit briller, on finit souvent par se brûler. C’est donc un thème qui s’inscrit parfaitement dans le fil rouge de l’album.

Quand vous regardez en arrière sur vos singles (ex. « I Love the Way You Fall »), jusqu’à maintenant, qu’est-ce qui a changé – tant dans la musique que dans la mentalité du groupe ?
À nos débuts, on testait, on explorait, on cherchait notre son. Aujourd’hui, on sait ce qu’on veut transmettre. On fait la musique qu’on aime, sans se censurer.
Cette liberté, c’est la plus grande évolution du groupe — artistique, mais aussi humaine.

Si vous pouviez résumer “Twisted Love” en trois mots, lesquels seraient-ils, et pourquoi ?
Puissance. Dualité. Libération.
Puissance pour l’énergie brute. Dualité pour les contrastes qui traversent chaque morceau. Libération, parce que cet album, c’est ma libération — une façon d’assumer pleinement qui je suis et d’accepter tout ce que j’ai longtemps voulu lisser ou cacher.

Sur cet album vous dites « accepter nos ombres pour guérir et se reconstruire ». Est-ce que ce processus de reconstruction est personnel pour chaque membre ou partagé collectivement ?
C’est personnel, mais profondément collectif. On a tous nos cicatrices, nos histoires, nos contradictions.
Cet album, c’est pour moi l’acceptation totale de ce que je suis — avec mes différences, mes paradoxes, mes zones d’ombre. Et bien sûr, tout cela résonne chez chacun d’entre nous.

Vous avez choisi de ne pas « rester dans une case ». Y a-t-il un morceau sur l’album où vous avez pris un risque particulier – musicalement ou lyriquement ? Lequel, et quel était ce risque ?
Twisted Love, sans hésiter.
Autant sur le plan musical — le morceau est dominé par un flow rap, ce qui est rare dans le metal — que sur le plan lyrique, où l’on aborde la sexualité, un sujet très peu traité dans ce genre.
Twisted Love, c’est à la fois se faire du bien et un peu mal, faire l’amour dans un monde en ruine. C’est la dualité entre le fun et le dark, le désir et le désespoir, la sensualité et l’apocalypse.

En tant que groupe formé à Paris en 2017, quelles sont vos destinations préférées en tournée et pourquoi ?
On adore jouer à Paris, évidemment, mais aussi à Lyon — l’énergie y est toujours incroyable.
En Belgique, le public est un vrai public de cœur, hyper chaleureux.
Et puis il y a l’Allemagne, terre du heavy, avec des fans passionnés qui vivent la musique à 300 %.

Y a-t-il un moment sur la route où tout ne s’est pas passé comme prévu (van en panne, instrument cassé, salle débordée…) mais qui est devenu une anecdote mémorable ?
Oui, à Berlin ! On logeait dans une auberge de jeunesse et on pensait être seuls… sauf que le lieu avait aussi été prêté à des jeunes pour une soirée techno.
On devait partir très tôt le lendemain pour la Pologne, donc impossible de dormir. On a fini par trouver un hôtel en urgence à 3 h du matin. Les joies de la tournée (rires) !

Quel est l’objet “gadget” que chaque membre emmène systématiquement en tournée (inutile mais indispensable !) ?
Moi : mes huiles essentielles, toujours.
Sonny : son masque à chat, évidemment.
Raph : son pot de Nutella (personne n’y touche).
Hector : sa GoPro — il filme absolument tout, même les galères.

Quel est le morceau du nouvel album que vous êtes les plus impatients de jouer live, et pourquoi ?
My Name Is Gold.
C’est un morceau taillé pour la scène, pour ce moment où tout explose, où le public et nous ne faisons plus qu’un. Il concentre tout ce qu’on aime : la puissance, la provocation et l’énergie brute du live.

Si vous étiez un riff de guitare, lequel seriez-vous, et pourquoi ?
Un riff de Devin Townsend.
Parce qu’il est à la fois lourd et mélodique, massif mais plein d’émotion. Ce contraste permanent entre intensité et beauté, c’est exactement ce que je cherche dans ODC.

Si vous pouviez inviter n’importe quel artiste (mort ou vivant) pour un duo surprise sur scène, qui choisiriez-vous et dans quel décor ?
Chester Bennington. Son émotion, son intensité, sa sincérité… il a tout ce que j’aime dans un artiste.
Je l’imagine sur scène avec nous, dans un décor urbain et cinématique — un mélange de néons, de pluie et de rage contenue.

Chaque membre choisit un personnage de film/manga/jeu vidéo qui représente sa façon de jouer sur scène — qui êtes-vous chacun ?
Celia Do > . Lisbeth Salander (Millenium) : la rage contenue, la vulnérabilité transformée en puissance. Une outsider qui se reconstruit en imposant ses propres règles.
Hector > Gizmo : Énergie explosive cachée sous une apparence calme
Sonny > Nana Ōsaki dans Nana : nonchalante et elle capte l’attention
Raph > Geralt de Riv (The Witcher) : Calme, précis, un peu ténébreux, il fait parler la puissance sans en faire trop.

Parmi vos chansons, si vous deviez en faire une version “chill acoustique dans un café parisien”, laquelle serait-ce ? Et à quel moment de la journée ?
The Beauty of the Beast.
En fin de journée, quand la lumière baisse et que tout se calme.
Je l’imagine en version piano/voix, épurée, avec juste cette émotion brute qui reste quand on enlève tout le reste.

Pour finir, si “Twisted Love” devait laisser une seule émotion dans le cœur de ceux qui l’écoutent, quelle serait-elle… et comment aimeriez-vous qu’elle les transforme ?
Un cri du cœur, brut et sincère.
J’aimerais que ceux qui l’écoutent ressentent cette émotion sans filtre, qu’ils soient touchés, bouleversés, émus avec nous — comme si, le temps d’un morceau, on libérait ensemble tout ce qu’on garde trop souvent à l’intérieur.

 

À travers Twisted Love, ODC signe un album à la fois cathartique et profondément humain, où les contradictions deviennent matière à création, à transformation et à libération. Entre élégance sombre, intensité sonore et vulnérabilité assumée, le groupe occupe désormais une place singulière dans la scène metal actuelle : celle d’artistes qui refusent les frontières, les étiquettes et les compromis. Twisted Love est plus qu’un album : c’est un cri, une reconstruction, une invitation à embrasser ses ombres pour mieux renaître. Et sur scène, cette énergie promet d’être encore plus incandescente.