Borderland, AMORPHIS

Borderland, AMORPHIS

26 septembre 2025 0 Par Chacha

Trois ans après Halo, Amorphis revient avec Borderland, son quinzième album studio, et prouve une fois encore qu’il reste l’un des piliers incontournables du metal mélodique et progressif. Fidèle à sa capacité unique de conjuguer lourdeur, lyrisme et atmosphères nordiques, le sextet finlandais choisit ici d’explorer une nouvelle zone de passage, un territoire charnière entre tradition et renouveau. Porté par la production de Jacob Hansen, ce disque se veut à la fois un retour aux racines et une ouverture vers d’autres horizons sonores : un véritable carrefour où ombre et lumière s’entrelacent.

 

“L’art des frontières” : l’univers visuel de Borderland

Avec Borderland, Amorphis soigne autant l’œil que l’oreille. La pochette, signée par Marald Van Haasteren, s’imprègne de symboles organiques et ésotériques, comme figés dans un entre-deux intemporel. Elle évoque un passage, une limite fragile entre l’ancien et le nouveau, entre le réel et l’imaginaire. Dans cette continuité, les clips — réalisés par Patric Ullaeus pour Bones, Dancing Shadow et Light and Shadow — accentuent cette idée de seuil : le noir et blanc y domine, créant une atmosphère où le clair et l’obscur dialoguent sans cesse. Chaque plan oscille entre mystère et révélation, donnant une traduction visuelle aux thèmes de l’album. L’ensemble forge une identité visuelle forte, où Amorphis réaffirme son rôle de passeur : entre traditions mythologiques et modernité, entre introspection et puissance scénique

Aux frontières de l’inspiration : Amorphis et la genèse de Borderland

Depuis ses débuts, Amorphis puise son identité dans un savant mélange de heavy metal, de death mélodique, de folk finlandais et de touches progressives. Borderland ne fait pas exception : l’album se nourrit à la fois des racines mythologiques et mélancoliques du groupe et d’un désir de modernité. Les influences orientales, perceptibles dans certains riffs et motifs mélodiques, côtoient des claviers atmosphériques rappelant le rock progressif des années 70. Cette richesse s’explique par la volonté d’Amorphis de se situer à la frontière entre plusieurs mondes musicaux — le titre de l’album en devient presque programmatique.

Le processus d’écriture, quant à lui, a été marqué par une approche plus resserrée et collective. Les membres ont présenté pas moins de 24 démos, puis en ont extrait l’essentiel pour construire une œuvre cohérente et concise. L’arrivée du producteur Jacob Hansen, en remplacement de Jens Bogren, a également apporté une dynamique nouvelle : moins de couches surproduites, plus d’organicité et de clarté. Chaque morceau a été pensé comme une pièce autonome mais reliée par une atmosphère commune, jouant sur les contrastes de lumière et d’ombre, de douceur et de puissance. Ainsi, Borderland témoigne d’une volonté d’évolution sans renier les fondations musicales qui font d’Amorphis une formation unique.

Voyage entre ombres et lumières : l’odyssée émotionnelle de Borderland

Avec Borderland, Amorphis embarque l’auditeur dans un périple où chaque morceau incarne un relief émotionnel différent : l’ouverture lumineuse de “Light And Shadow” instaure une tension entre mélancolie et espoir, avant que “Bones” ne vienne frapper de toute sa densité, éveillant une force brute presque cathartique. Plus loin, “Dancing Shadow” apporte une respiration plus immédiate, presque festive, contrastant avec la noirceur contenue dans “The Lantern”, où se déploie une gravité solennelle. Chaque passage alterne ainsi entre clair-obscur, lourdeur et envolées, comme si le groupe retraçait le tumulte d’un voyage intérieur. L’auditeur se retrouve happé dans cette “terre de frontière”, balloté entre nostalgie, puissance et résilience, en ressortant autant apaisé qu’ébranlé.

 

En fin de compte, Borderland n’est pas l’album de la rupture, mais celui de la maturité affirmée. Amorphis y célèbre son identité avec une sincérité intacte, tout en ouvrant quelques portes vers de nouvelles nuances. Sans révolutionner sa formule, le groupe prouve qu’il reste maître dans l’art de conjuguer mélodie et puissance, héritage et modernité. Plus direct que certains de ses prédécesseurs mais toujours riche en émotions, Borderland s’impose comme une œuvre solide, qui conforte Amorphis dans son rôle de référence incontournable de la scène metal contemporaine.