I Feel The Everblack Festering Within Me, LORNA SHORE
12 septembre 2025 0 Par Chacha
Il y a des albums qui s’écoutent, et d’autres qui s’endurent comme une épreuve initiatique. Avec I Feel The Everblack Festering Within Me, Lorna Shore signe un nouveau chapitre d’une intensité démesurée, un voyage au cœur des ténèbres où la brutalité la plus viscérale s’entrelace avec des orchestrations d’une grandeur tragique. Après avoir marqué durablement la scène avec Pain Remains, le groupe américain revient en 2025 avec une œuvre qui ne cherche pas seulement à repousser les limites du deathcore symphonique, mais à les pulvériser, quitte à frôler la démesure.
L’ombre qui dévore la lumière
La pochette de I Feel The Everblack Festering Within Me prolonge parfaitement l’univers sonore de Lorna Shore : un tableau apocalyptique où la noirceur prend forme, presque organique, comme une matière vivante qui consume tout sur son passage. On y distingue une silhouette noyée dans un décor cataclysmique, happée par un gouffre de ténèbres qui s’étend comme une infection cosmique. Les contrastes de lumière, rares et fragiles, suggèrent encore la possibilité d’un éclat d’espoir, mais celui-ci est étouffé par le flux écrasant de noirceur. Cette imagerie, entre peinture baroque et vision cauchemardesque, incarne visuellement le titre de l’album : la noirceur n’est pas extérieure, elle prolifère de l’intérieur, et finit par engloutir tout ce qui la contient.
Quand la symphonie rencontre l’abîme
Pour I Feel The Everblack Festering Within Me, Lorna Shore s’est nourri d’un large spectre d’inspirations : le death metal le plus brutal, la noirceur du black metal symphonique à la Dimmu Borgir, et les envolées orchestrales proches de musiques de films épiques ou d’opéras gothiques. L’idée n’était pas seulement de renforcer la violence inhérente au deathcore, mais de lui donner une dimension quasi cinématographique, où chaque morceau devient une fresque dramatique. Les influences classiques et orchestrales s’entrelacent avec des riffs acérés et des structures complexes, créant un univers sonore qui oscille entre majesté et chaos.
Le processus d’écriture a été marqué par une volonté de construire des morceaux “vivants”, presque narratifs, où la brutalité extrême sert une émotion profonde plutôt qu’un simple choc sonore. Le groupe a travaillé collectivement en superposant des couches — riffs, orchestrations, textures vocales — puis en retravaillant chaque section pour atteindre un équilibre entre agressivité et beauté. L’intégration de moments plus introspectifs, comme sur Glenwood, découle de cette recherche d’intensité émotionnelle. Le résultat est un album pensé comme une expérience totale : écrasant, cathartique et immersif, mais toujours guidé par une intention artistique claire.
Plongée dans l’abîme grandiose
Dès les premières secondes de Prison of Flesh, l’auditeur est happé par une tempête orchestrale et gutturale qui installe une tension viscérale, entre terreur et fascination. Les morceaux les plus violents, comme War Machine ou Unbreakable, déchaînent une rage implacable où l’adrénaline se mêle à une sensation d’écrasement presque cathartique. À l’inverse, des instants suspendus tels que Glenwood ou les envolées poignantes de Forevermore apportent une profondeur mélancolique qui transcende la brutalité et touche à l’intime. Chaque temps fort de l’album joue ainsi sur le contraste entre chaos absolu et beauté dramatique, plongeant l’auditeur dans un voyage émotionnel qui oscille entre la sidération, l’émerveillement et la libération.
En somme, I Feel The Everblack Festering Within Me n’est pas seulement un nouvel album de Lorna Shore, mais une véritable démonstration de force. Entre chaos absolu et envolées symphoniques, le groupe atteint un équilibre fragile mais saisissant, capable de toucher autant qu’il écrase. Plus qu’une confirmation, c’est une consécration : Lorna Shore s’impose définitivement comme une référence incontournable du deathcore moderne, et prouve qu’il est encore possible de repousser les frontières du genre sans en perdre l’âme.