Anteroom, FAUXX
21 novembre 2025 0 Par Chacha
Aux portes du chaos : un passage obligé vers un futur dystopique
Avec Anteroom, FAUXX franchit un cap et propose un disque d’une densité rare, où l’industriel, le metal moderne et une esthétique cyberpunk s’imbriquent dans un récit sombre. L’album agit comme un sas — une antichambre — entre ce que le groupe a été et ce qu’il s’apprête à devenir. Et dans cet espace liminal, les neuf titres frappent comme autant de visions d’un monde en rupture, où la technologie et l’humain s’entrechoquent sans relâche.
La genèse : un album-cathédrale né du chaos
Écrit durant une période de fragmentation personnelle et collective, Anteroom s’impose comme un disque de transition, un espace liminal – d’où son titre – où l’on fait face à ses spectres avant de franchir un seuil. FAUXX y explore les thèmes de la paranoïa contemporaine, de la surcharge informationnelle, des guerres intimes qui se jouent dans les interstices. On y ressent autant l’urgence que le soin obsessionnel portés aux textures électroniques, aux guitares abrasives et aux rythmiques martiales.
C’est également un album construit sur le contraste : entre abrasion et sensualité sombre, entre lucidité froide et grands élans mélodiques. FAUXX semble y sculpter un espace sonore où les machines se fissurent pour laisser filtrer une humanité libératrice.
Une architecture thématique sombre et viscérale
« Hyperwar » & « Dig » : l’ouverture sous tension
Le disque s’ouvre sur “Hyperwar”, titre-manifeste qui pose immédiatement la grammaire sonore d’Anteroom. Guitares stridentes, pulsations industrielles, voix scandée : un démarrage en mode alarme rouge. Le morceau aborde la guerre totale moderne — informationnelle, psychologique, sécuritaire — et la sensation d’être pris dans un flux impossible à dompter.
“Dig” enchaîne avec un riff compact et une énergie plus organique. Le texte creuse (littéralement) l’idée d’aller chercher la vérité sous les couches de mensonges et d’automythification. Musicalement, FAUXX opte pour un mid-tempo lourd, presque sludge, avec un refrain plus aérien qui marque déjà la diversité du disque.
« Sun Of Despair » & « The Revealer » : le cœur émotionnel
Avec “Sun Of Despair”, le groupe s’autorise des nuances plus mélancoliques. Le chant y gagne en ampleur et la progression harmonique installe un climat de déclin magnifique. C’est l’un des morceaux les plus mélodiques du disque, sans sacrifier la tension permanente.
“The Revealer”, avec le featuring de Diego (Karras), introduit une agressivité plus extrême. Les deux voix fusionnent dans une incantation noire, soutenue par des guitares tranchantes et un break quasi chaotique. Le texte évolue autour de la révélation brutale des vérités qu’on préfère ignorer — un thème cher au post-metal contemporain.
Titres phares : abysses numériques et chaos incandescent
« Burnt Velvet Retinas » & « Demiurge Data » : l’esthétique du glitch
Dans “Burnt Velvet Retinas”, FAUXX distille une atmosphère cyberpunk, mélangeant riffs hachés, nappes synthétiques et un groove métallique presque dansant. Le morceau traite de la saturation visuelle moderne, de la consommation compulsive d’images qui brûlent la rétine et anesthésient l’esprit.
“Demiurge Data” pousse encore plus loin la dimension industrielle. Le titre évoque la création d’un “faux dieu” algorithmique qui modèle nos perceptions. Le travail sur les voix — filtrées, compressées, fragmentées — traduit parfaitement ce brouillage identitaire.
Un hommage résolument heavy : « Here Comes The War »
La reprise de New Model Army, “Here Comes The War”, est l’un des moments marquants de l’album. FAUXX modernise le titre, le durcit, lui injecte une noirceur post-apocalyptique tout en respectant l’esprit originel. Un hommage puissant, sans nostalgie poussiéreuse.
« Poison Life » : l’adieu en forme d’uppercut
L’album se clôt sur “Poison Life”, morceau cathartique qui résume les tensions du disque : violence contenue, mélodies poignantes, production ample. Le texte parle d’autodestruction, mais aussi de lucidité — celle qui précède l’émancipation. Une fin brutale et sublime.
Avec Anteroom, FAUXX signe un album ambitieux, intelligent et viscéral, qui conjugue rugosité métallique, atmosphères industrielles et poignées d’émotion à vif. C’est un disque qui se vit autant qu’il s’écoute, une traversée dans un monde où l’urgence brûle chaque seconde. FAUXX confirme ici qu’il n’est pas seulement un nom à suivre, mais déjà un acteur majeur d’une scène rock/metal qui n’a pas peur d’évoluer vers le sombre, le conceptuel et le dérangeant.


