The Blastbeaters, ROYAL REPUBLIC

The Blastbeaters, ROYAL REPUBLIC

7 novembre 2025 0 Par Chacha

 

Depuis leurs débuts, Royal Republic s’est imposé comme un groupe à contre-courant, jonglant avec les codes du rock’n’roll, du punk et de la pop avec une insolence jubilatoire. Mais avec The Blastbeaters, les Suédois choisissent de prendre tout le monde à revers. Ici, pas question de riffs enjoués ou de refrains clinquants : le groupe plonge tête première dans l’univers frénétique du metal extrême, avec une énergie qui oscille entre respect du genre et pur plaisir de la transformation. L’EP se présente comme un laboratoire explosif, où l’humour côtoie la puissance brute — et où Royal Republic montre qu’il n’a pas peur de faire sauter les frontières stylistiques.

 

La Pop en Sang : Quand Royal Republic Devient The Blastbeaters

Il suffit d’une image pour comprendre que The Blastbeaters n’est pas une simple parenthèse : la pochette — quatre visages grimés en corpse paint, bouches dégoulinantes de rouge — évoque le black metal le plus théâtral, mais avec une texture volontairement trop nette, trop graphique, presque trop bien découpée. C’est un masque, un jeu conscient, une appropriation du folklore visuel extrême pour mieux le tordre. Les clips associés prolongent ce décalage : lumières agressives, postures outrées, grimaces carnivalesques. The Blastbeaters ne cherche pas à imiter le metal extrême : il le met en scène, l’exagère, le retourne en performance jubilatoire. On rit, mais on rit avec eux — jamais contre.

Ce projet respire l’amour du détournement. Royal Republic a toujours eu ce don de rendre hommage en désacralisant : prendre la pop, la disco, le rock FM — et y injecter une énergie punk. Ici, le groupe part de standards disco-pop déjà iconiques (Venus, I’m So Excited, Stayin’ Alive, Go West) pour les réimaginer en torpilles metal. Le travail de production repose sur une logique claire : conserver la colonne vertébrale mélodique, mais la propulser dans un environnement saturé — guitares épaisses, batterie en accélération constante, chant éraillé ou plein d’aplomb. C’est un laboratoire d’intensité contrôlée, où le groupe teste jusqu’où on peut pousser la flamboyance sans la faire imploser.

Venus ouvre l’EP avec panache. Le riff principal claque comme une porte métallique dans un couloir de réverbération. J’entends la chanson que je connais — mais sous amphétamine. Le refrain explose comme un cri de bataille. Je me sens galvanisée, presque invincible. Je ne danse plus : je charge.
I’m So Excited devient un hymne de transe. La montée est constante, sans espace pour respirer. Le morceau transforme l’excitation en tension nerveuse, délicieusement insoutenable. Je sens mon cœur battre plus vite ; je souris, mais avec les dents serrées.
Stayin’ Alive, ici, perd son clin d’œil disco et se réincarne en déclaration survitaminée. Le groove devient marteau-piqueur. Le célèbre “ah, ha, ha, ha” n’est plus cool — il est viscéral, presque défiant. Je me sens vivante, mais vivante comme une étincelle prête à mettre le feu.
Puis Go West vient refermer ce maelström dans une spirale quasi liturgique. Hymnique, ironique, fédératrice. Je me surprends à lever le poing, à chanter trop fort. Je comprends : ce n’est pas du second degré. C’est du trop degré — et c’est précisément ce qui libère.

En tant qu’auditrice, je traverse quelque chose de très physique. Je ne reçois pas la musique : je suis happée, entraînée, projetée. Je me sens tour à tour puissante, euphorique, hilare, conquérante. Cet EP est une permission : celle de prendre une esthétique extrême sans la peur du ridicule. Celle de se laisser aller à l’excès pur. Celle de ne pas choisir entre sérieux et plaisir.

The Blastbeaters n’est pas une blague. C’est un manifeste :
tout peut devenir metal, si on l’assume assez fort.
Et moi, en l’écoutant, j’assume avec elles.

 

En fin de compte, The Blastbeaters n’est pas seulement un exercice de style : c’est une démonstration de liberté artistique. Royal Republic prouve qu’un groupe solidement ancré dans son identité peut se permettre d’explorer d’autres territoires sans se perdre en route. Ici, les blast beats ne servent pas à grimacer, mais à sourire — un sourire large, gourmand, presque provocateur. Cet EP court, intense et réjouissant rappelle qu’au-delà des étiquettes, la musique reste un terrain de jeu. Et Royal Republic, plus que jamais, joue pour gagner.